C’est quoi la biomasse ?

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C’est quoi la biomasse ?

On entend souvent parler de « valorisation de la biomasse ». Mais le grand public ignore souvent ce dont il s’agit. La biomasse c’est en réalité des matières premières qui est exploitée par les chercheurs et les industries de la chimie. Elle sert à concevoir de schémas de production alternatifs ou de nouvelles solutions technologiques en vue de lutter contre les impacts environnementaux négatifs et de maitriser mieux l’exploitation des ressources fossiles dont les gisements s’appauvrissent.

C’est quoi la biomasse ? La réponse n’est pas si évidente et précise qu’il n’y paraît.

La biomasse fait référence aux matière organiques renouvelables à l’échelle du temps humain. C’est donc une matière non-fossile qui est exploitée pour des usages tels que l’alimentation qu’elle soit humaine ou animale, pour la manufacture de différents produits ou pour générer de l’énergie sous la forme de chaleur ou d’électricité. La biomasse peut être végétale ou animale et comprend entre autres les cultures comme par exemple les céréales, les oléagineux, les fruits ou les légumes. La biomasse renferme aussi les cultures fourragères et les pâturages, les forêts et ses divers produits mais aussi les animaux, les poissons et les résidus de la pêche, ou de l’élevage.

Toute cette biomasse a déjà des usages. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture a ainsi identifié qu’environ 65% de cette biomasse totale était destinée en Europe à l’alimentation humaine et animale, que 12% étaient exploités pour l’énergie et que les quelques 20 pourcents restants servaient à la manufacture de divers produits dont du papier, des meubles, du cuir ou des textiles.

La chimie verte a pour ambition d’exploiter cette biomasse pour substituer complétement ou partiellement ses intrants fossiles comme le pétrole dans ses schémas de production. Même si la biomasse est par définition aussi bien animale que végétale, la chimie verte s’intéresse préférentiellement à la biomasse végétale. Oui mais voilà. Exploiter le végétal pour en formuler de nouvelles solutions technologiques à destination du secteur chimique va nécessiter une réflexion de fond.

En effet, la population mondiale ne cesse d’augmenter. Elle est passée de 3,7 à 7,5 milliards d’habitants entre les années 70 et aujourd’hui et cette tendance ne va faire que de s’accentuer. La biomasse végétale joue divers rôle. Elle a notamment pour but prioritaire de nourrir cette population, de nourrir les animaux dont nous tirons une partie de nos besoins. 80 à 85% des céréales cultivées dans l’Union Européenne remplissent ainsi cette fonction.

Si la chimie s’intéresse au végétal, il va falloir trouver des solutions concertées qui permettront de staifaire les besoins de ce secteur émergeant tout en ne déstabilisant pas les marchés et usages existants, et ce dans le respect des pratiques culturales et des équilibres écosystémiques. C’est donc loin d’être simple.

Pour éviter une compétition d’usage marquée entre le secteur alimentaire et la chimie, les industries et les chercheurs se penchent sur des solutions alternatives. Ils ont donc inclus dans la définition initiale de la biomasse d’autres types de culture non alimentaires comme le miscanthus ou le chanvre. On y a aussi inclus d’autres types de matières renouvelables, notamment les sous-produits ou résidus de l’agriculture, de l’agro-alimentaire ou des industries de transformation non-alimentaires. C’est le cas de certains résidus de culture c’est à dire des parties non récoltées de certaines plantes comme les pailles de céréales, certaines feuilles, des racines, notamment. C’est le cas aussi de certains noyaux de fruits, de pépins, d’épluchures issus des industries de confection agro-alimentaire. On peut également citer des sciures, des boues, des effluents liquides ou solides des industries de transformation non alimentaires qui contiennent parfois des composants organiques renouvelables.

Mais cette longue liste ne s’arrête pas là. On inclut également dans cette définition les « déchets ». Cela peut être des déchets d’élagage ou de jardinage que nous retrouvons dans nos parcs à containers ou ailleurs. C’est aussi les fractions organiques qui proviennent de nos déchets ménagers. La biomasse c’est également les algues ou plutôt les micro-algues cultivées pour servir de matières premières aux industries de la bioéconomie. Mais cela peut aussi être certains types d’insectes.

Le terme de biomasse est dont large et varié. Cette biomasse, est qualifiée de première génération quand elle est d’ordinaire destinée au secteur alimentaire. Par opposition à la biomasse de seconde génération, plus récente dans les schémas de réflexion et dont l’usage conventionnel sort du cadre alimentaire. Les graines de céréales, les plantes oléagineuses sont donc des matières de première génération par opposition aux arbres, aux résidus industriels ou aux déchets ménagers qui sont des biomasses de seconde génération. Les matières de première génération sont schématiquement riches en amidon, en lipides ou en protéines. Les biomasses de seconde génération sont plutôt enrichies en diverses molécules dont principalement la cellulose, la lignine, les hémicelluloses, et bien d’autres.

Chacune de ces biomasses possède des molécules biologiques qui lui sont spécifiques et dont la teneur et la structure varient en fonction de facteurs supplémentaires comme l’état de croissance de la plante voire ses conditions de culture. Un plant de maïs n’aura pas strictement la même composition chimique s’il a été cultivé au soleil ou à l’ombre dans un même champ. En plus, la biomasse ce n’est pas une ressource fossile, c’est une matière vivante et elle contient beaucoup d’eau. Certaines biomasses se décomposent donc spontanément ce qui influence aussi leur composition chimique et nécessite de mettre en œuvre des stratégies de stockage et de conservation adéquates.

Valoriser la biomasse pour la production de nouveaux produits, molécules ou carburants n’est donc pas si évident qu’il n’y paraît puisque les scientifiques sont confrontés à un inconvénient de taille : la biomasse a une composition chimique variable. Le choix de la biomasse va donc dépendre de l’application qui est visée et inversement.

La biomasse est une matière dont le potentiel de conversion est multiple. On peut faire de nouveaux carburants avec la biomasse que ce soit du bioéthanol, du biodiesel ou même du kérosène pour l’aviation. On peut transformer la biomasse pour en faire les mêmes produits que ceux délivrés par l’industrie pétrochimique actuelle mais on peut aussi faire de nouveaux produits avec des propriétés originales. On peut étudier la biomasse et ses caractéristiques à l’état naturel et essayer de retirer les mêmes fonctions dans certains produits spécifiques. C’est ce qu’on appelle le biomimétisme. Etudier pourquoi l’eau n’adhère pas à la surface des végétaux permet de formuler de nouveaux revêtements hydrophobes pour les peintures, les toitures ou les carrosseries des voitures. On peut utiliser la biomasse pour en faire des cosmétiques, des encres, de nouveaux solvants ou même des fibres textiles.

Mais pour pouvoir sécuriser et dynamiser cette nouvelle filière d’industrie de transformation de la biomasse, il faut mobiliser de manière cohérente la biomasse, dans des quantités de plus en plus importantes, de manière synergique avec les filières existantes notamment les filières alimentaires. Cela implique donc de réfléchir de manière approfondie à la mise en place de système de gestion durable des terres agricoles et forestières, de systèmes de logistiques opérationnels et performants, mais aussi de sécuriser les filières existantes en évitant la compétition d’usage marquée.

 

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