Que sont les biocarburants ?
Vous avez dit « biocarburants » ?
On en entend beaucoup parler, mais que sont vraiment les biocarburants ? Sont-ils différents des carburants conventionnels ? Existe-t-il une différence entre bioéthanol, biodiésel, biokérosène ? Quels sont les enjeux de ces « biocarburants » ? Autant de questions dont les réponses ne sont pas toujours évidentes…
Les biocarburants, ce sont des carburants qui sont produits au départ de plantes et non pas de ressources fossiles. Ce sont donc des produits issus de ressources renouvelables, que de nombreux scientifiques positionnent comme des éléments de réponse aux problèmes énergétiques actuels.
On pense que les biocarburants sont récents, développés il y a seulement quelques années. En fait, pas vraiment… Henry Ford au début du 20ème siècle avait déjà réfléchi à l’idée d’utiliser de l’éthanol pour alimenter une de ses dernières créations automobiles. A la même époque, certains moteurs diesel étaient même alimentés avec de l’huile d’arachide…
Mais la découverte de gisements de pétrole suffisants ont longtemps maintenu (jusque dans les années 70) le prix du diesel et de l’essence assez bas pour les moteurs de nos véhicules. L’augmentation du prix du baril de pétrole, les considérations géo-politiques et stratégiques associées, les récentes approches sur le réchauffement climatique et les émissions de dioxyde de carbone vont progressivement, dans les années 80-90, remettre au gout du jour l’intérêt et la popularité des biocarburants. Les chercheurs et scientifiques s’emparent alors du dossier.
Le biocarburant le plus connu, celui sur lequel s’axe le plus de recherches, c’est le bioéthanol. Le bioéthanol, c’est quoi ? Tout simplement de l’éthanol. Le préfixe « bio » fait allusion au fait que cet éthanol a été produit au départ de ressources renouvelables, et en particulier de plantes. Ces plantes, ce sont majoritairement des plantes destinées à l’alimentation, riches en sucres ou en amidon comme la canne à sucre, le blé ou encore le maïs. On leur fait subir différents traitements, en particulier de la fermentation, et on obtient de l’éthanol. La production est assez simple, offre de bons rendements et le bioéthanol généré peut être additionné à nos essences de roulage.
Le biodiésel est une variante qui peut, quant à lui, être additionné à notre diésel de roulage. Ce biocarburant est aussi produit au départ de plantes. Mais pas les mêmes. Dans ce cas, il faut utiliser des plantes riches en lipides (en huiles) comme le colza ou le tournesol qui vont être converties par des technologies qui sont différentes de celles utilisées pour la manufacture de bioéthanol.
Tout cela semble promis à un bel avenir mais au début des années 2000, le débat s’alimente. Produire des biocarburants au départ de plantes destinées à notre alimentation, est ce vraiment la solution ? Et si on regarde la chaine de production de ces biocarburants dans son ensemble, est ce que l’impact environnemental associé est réellement positif ? Nous, les scientifiques sommes formels: nous devons revoir notre copie.
Une des premières stratégies est d’exploiter, à la place des plantes « alimentaires », des matières végétales qui ne rentrent pas en conflit avec les industries agro-alimentaires. Les chercheurs investiguent donc les pailles de céréales, le bois, les résidus industriels organiques, les cultures dédiées , et même nos poubelles ménagères pour produire de nouveaux biocarburants. Les recherches explosent dans ce domaine et la littérature scientifique déborde. Des milliers de publications voient le jour. Mais la recherche s’enlise peu à peu. Il n’est en effet pas si simple de produire des biocarburants au départ de matières végétales de nouvelle génération. Les procédés à mettre en oeuvre sont plus complexes, plus techniques, plus exigeants, plus onéreux. Il faut maintenant mettre en oeuvre la chimie et ses méthodes pour obtenir des solutions. Et ce n’est pas encore gagné. Des milliers de chercheurs à travers le monde s’intéressent à ce sujet de recherche.
Alors quelle est la solution ? La réponse est complexe, car dans cette immense opportunité économique et énergétique que constituent les biocarburants, se sont progressivement insérés des débats idéologiques, politiques, environnementaux et même régionaux ! Pour être rentables, savez pas par exemple que le biodiésel avec lequel vous roulez contient de l’huile de palme. Et la production d’huile de palme est fortement décriée ! Et pas vraiment locale….
Que faire ? Doit on laisser la recherche continuer dans cette voie ? Bien sûr ! Parce que la recherche insuffle l’innovation dont a fortement besoin ce secteur des biocarburants de roulage. Et les scientifiques ont des idées et des solutions d’avenir. Car à coté du biodiésel et du bioéthanol se trouve une autre opportunité bien plus intéressante: le biokérosène. L’aviation civile est en effet un immense terrain pour l’exploitation de ces carburants issus de ressources renouvelables. De nombreuses compagnies aériennes en sont conscientes comme United Airlines, KLM et bien d’autres. Leur objectif est simple: avec l’utilisation de ce nouveau biokérosène, il serait possible de réduire les émissions de gaz à effet de serre de plus de 60%.
Un petit secret ? Savez vous que notre laboratoire de l’Université de Liège développe du biokérosène ? Qui sait, un jour, votre avion s’envolera un peu grâce à nous…
Plus d’informations ? a.richel@uliege.be